Le directeur général de Nokia sous pression

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HELSINKI/FRANCFORT (Reuters) – Stephen Elop, le directeur général de Nokia, n’a que quelques mois pour prouver que sa stratégie est la bonne, mais il y a peu de chances que le nouveau smartphone du groupe finlandais séduise les clients d’Apple ou de Samsung.

Stephen Elop a jusqu’à début 2013 pour montrer qu’il a eu raison de choisir Microsoft et son système d’exploitation mobile Windows Phone ou ses jours à la tête du groupe déficitaire seront comptés, estiment investisseurs et analystes.

Nokia vend encore quasiment un million de téléphones par jour mais les analystes voient le Lumia 920 perdre la bataille contre l’iPhone 5 d’Apple pendant la période des fêtes de fin d’année.

“Elop n’a pas su séduire les clients et c’est ce qui compte. On peut toujours dire qu’il n’a pas eu assez de temps, mais il est en poste depuis deux ans. Il n’est que temps”, affirme Magnus Rehle du cabinet Greenwich Consulting.

L’heure de vérité pour Stephen Elop a sonné début septembre, quand Nokia a lancé ses premiers modèles équipés de Windows Phone 8.

Stephen Elop a assuré que ces nouveaux combinés séduiraient mais le Lumia 920 s’avère n’être qu’une nouvelle version d’un téléphone précédent et l’action Nokia a dévissé durant la présentation de ses nouveaux appareils, perdant près d’un quart de sa valeur en deux séances.

Si le titre a regagné du terrain depuis (aux alentours de 2,20 euros), dans un contexte de reprise des marchés, il reste en deçà de son cours avant le lancement.

De solides ventes de fin d’année pourraient aider Stephen Elop mais les investisseurs doutent que cela arrive.

“La période de Noël est une cause perdue. S’il existe encore une chance pour Nokia, elle est au printemps”, affirme Juha Varis, gérant du fonds Danske Invest Finnish Equity Fund.

COURAGEUX

Nokia était déjà en difficulté quand le Canadien a pris les rênes de l’ex-numéro un mondial des téléphones portables en septembre 2010.

Sa part sur le segment des smartphones est passé à 33% contre 39% il y a deux ans et certains analystes recommandaient une stratégie audacieuse.

En février 2011, Stephen Elop a surpris les investisseurs en abandonnant le système d’exploitation Symbian de Nokia, pour celui de son ancien employeur Microsoft. Il tablait sur une période de transition de deux ans et promettait une marge d’exploitation d’au moins 10% à long terme.

“Il a pris quelques décisions courageuses et le courage est ce qui a longtemps manqué au groupe avant l’arrivée d’Elop”, affirme Sami Sarkamies, analyste chez Nordea. Mais il ajoute que ce dernier n’a que jusqu’à la fin du premier ou du deuxième trimestre 2013 pour prouver que sa stratégie fonctionne.

Jusqu’ici, Stephen Elop n’a pas réussi à stopper le déclin du groupe, qui a accumulé une perte opérationnelle de plus de trois milliards d’euros au cours des 18 derniers mois.

LA BATAILLE CONTRE APPLE

Stephen Elop a besoin de fortes ventes à la fin de l’année pour valider sa stratégie mais les analystes estiment que les consommateurs préféreront l’iPhone ou le Galaxy de Samsung.

Apple a enregistré plus de deux millions de précommandes au premier jour du lancement de l’iPhone 5, un chiffre supérieur aux attentes (voir ). Nokia devrait vendre moins de quatre millions de combinés Windows ce trimestre, tandis que Samsung a écoulé 20 millions de Galaxy S3 en trois mois.

“Ce sera certainement un Noël sous le signe de l’iPhone”, prédit Carolina Milanesi, analyste chez Gartner.

Certains investisseurs misent sur la capacité du groupe à se réinventer, lui, qui, menacé par la faillite dans les années 90, a su passer des bottes en caoutchouc et du papier toilette à l’ordinateur puis aux téléphones portables.

Nokia a encore vendu 6 millions de smartphones équipés de Symbian au deuxième trimestre, plus que les quatre millions de téléphones Windows, bien qu’il n’ait lancé qu’un seul modèle avec son système d’exploitation au cours des 12 derniers mois.

Le cours actuel de l’action Nokia représente aussi des opportunités pour ceux qui voient Microsoft devenir le troisième acteur du marché des smartphones, à côté de Google et d’Apple.

Les analystes financiers estiment cependant que les difficultés de Nokia perdureront et prévoient en moyenne une perte de 0,02 euro par action. Thomson Reuters StarMine table sur une perte de 0,06 euro par titre en 2013.

Pour Magnus Relhle de Greenwich Consulting, le groupe finlandais devrait proposer des smartphones équipés d’Android de Google aux millions de consommateurs des pays émergents qui préfèrent toujours la marque Nokia.

Les combinés Android coûtent moins de 100 dollars quand le moins cher des Windows Phone en vaut 200.

Juha Varis du fonds Danske Invest Finnish Equity Fund partage l’analyse mais souligne que se concentrer sur Android signifierait que Stephen Elop a perdu son pari avec Microsoft.

“C’est totalement un homme de Microsoft, donc il est logique qu’il doive démissionner ensuite”, commente-t-il.

Avec Ritsuko Ando à Helsinki; Catherine Mallebay-Vacqueur pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat

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