Apple rejette les soupçons d’évasion fiscale au Congrès

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par Patrick Temple-West

WASHINGTON (Reuters) – Le directeur général d’Apple, Tim Cook, a défendu mardi la stratégie fiscale de son groupe lors d’une audition au Sénat au cours de laquelle il s’est vu reprocher d’avoir transféré des milliards de dollars de profits en Irlande afin de payer moins d’impôts.

Hasard du calendrier, cette audition est intervenue à la veille d’un Conseil européen durant lequel les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union doivent notamment débattre des moyens de mieux lutter contre la fraude fiscale.

L’audition de mardi est la deuxième menée par le sénateur du Michigan Carl Levin, un démocrate qui préside la sous-commission d’enquête permanente du Sénat et entend réformer l’impôt sur les sociétés aux Etats-Unis.

Il reproche à Apple d’avoir transféré des milliards de dollars de bénéfices dans des filiales basées à l’étranger pour réduire les impôts qu’il paie aux Etats-Unis.

Les sociétés américaines sont taxées à hauteur de 35% sur leurs bénéfices réalisés à l’étranger mais seulement après le rapatriement de ceux-ci aux Etats-Unis.

En 2012, a dit Carl Levin, Apple a ainsi évité de payer neuf milliards de dollars d’impôts.

Devant les sénateurs, Tim Cook a déclaré que son groupe était l’un des plus importants contribuables des Etats-Unis avec plus de six milliards de dollars payés au fisc en 2012.

“Nous nous attendons à en payer encore plus cette année”, a-t-il ajouté.

“Nous payons tous les impôts que nous devons”, a-t-il assuré. “Nous ne camouflons pas de l’argent sur je ne sais quelle île des Caraïbes.”

Un mémorandum de 40 pages publié par la sous-commission sénatoriale identifie trois filiales d’Apple qui n’ont de domiciliation fiscale ni en Irlande, où elles sont enregistrées, ni aux Etats-Unis, d’où elles sont gérées.

COMBLER LES FAILLES

La principale d’entre elles, une holding qui inclut les magasins d’Apple dans toute l’Europe, n’a pas payé d’impôt sur les sociétés au cours des cinq dernières années. Or cette filiale, qui a une adresse postale à Cork (Irlande), a reçu 29,9 milliards (23,2 milliards d’euros) de dividendes d’autres filiales entre 2009 et 2012, l’équivalent des 30% des bénéfices nets réalisés par la firme à la pomme sur cette période, selon le rapport sénatorial.

“Apple a exploité une faille entre les règles de résidence fiscale de l’Irlande et des Etats-Unis”, conclut le mémorandum.

Apple nie avoir recours à des artifices et assure que l’existence de sa filiale “Apple Operations International” en Irlande ne l’empêchera pas de payer pour plus de sept milliards d’impôts aux Etats-Unis au titre de l’exercice clos le 31 mars 2013.

Les autorités américaines, comme les européennes, s’efforcent actuellement, difficultés budgétaires obligent, de réduire l’impact des pratiques dites d'”optimisation fiscale”. Cette démarche cible en premier lieu les entreprises multinationales, souvent accusées d’exploiter les failles des systèmes fiscaux.

“Combler ce genre de failles injustifiées pourrait rapporter des centaines de milliards de dollars pour réduire le déficit et éviter des coupes budgétaires dommageables”, a dit mardi Carl Levin mardi.

Le républicain John McCain, lui, a salué la réussite exemplaire d’Apple tout en jugeant que la stratégie fiscale adoptée par le groupe résultait d’un système fiscal “défectueux”.

“Pendant des années, Apple a choisi d’éviter une partie de ses contributions au Trésor américain et à la société américaine en transférant des profits et en contournant certains impôts américains”, a-t-il dit.

Apple milite pour une réforme fiscale qui abaisse les taux d’imposition et demande qu’une ponction “raisonnable” soit effectuée sur les bénéfices internationaux afin d’encourager leur rapatriement aux Etats-Unis.

La sous-commission sénatoriale devait aussi entendre mardi des représentants du fisc et du département du Trésor.

L’Irlande, par la voix de son vice-Premier ministre Eamon Gilmore, a affirmé ne pas être responsable des faibles impôts payés par Apple.

“Le système fiscal irlandais n’est pas en cause, ce sont des questions qui concernent les systèmes fiscaux d’autres juridictions et qui doivent être réglées d’abord dans ces juridictions”, a-t-il dit à la chaîne irlandaise RTE.

Véronique Tison pour le service français

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