Quand Mike Markkula interdisait la vente d’ordinateurs Apple à distance

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Connaissez-vous Armas Clifford « Mike » Markkula ? Il fut le CEO d’Apple de 1981 à 1983. Il fut surtout le premier investisseur de la marque, en prêtant près de 350 000 dollars aux deux Steve pour leur permettre de financer la création de l’Apple II en 1977, et en les accompagnant dans la création de leur entreprise.

Nous avons retrouvé une interview publiée en octobre 1982 dans la toute première revue officielle d’Apple, Apple on Apples. En introduction, après avoir rappelé son parcours auprès de deux géants des semi-conducteurs, le journaliste présente Markkula comme « un gars ordinaire », installé avec les autres salariés dans l’open space de l’entreprise, un gars avec qui on discute facilement…

Markkula aborde tout d’abord les forces d’Apple. Il veut que la marque soit réputée comme la meilleure dans chaque domaine : elle doit fabriquer de meilleurs produits que Sony, elle doit mieux traiter ses salariés que HP, et devenir plus innovante qu’Intel. Il veut qu’Apple offre un service indiscutable à ses clients, justifiant ainsi l’interdiction de la vente à distance de ses ordinateurs. Il veut que chaque client bénéficie d’un contact avec un vendeur, afin de se familiariser avec sa nouvelle machine.

Justement, nous avons retrouvé sur eBay un catalogue du revendeur Olympic Sales Company datant de 1982, dont la première page n’est rien d’autre qu’une protestation contre cette décision ! La couverture du catalogue reprenait donc le courrier de Mark Markkula, informant Olympic qu’elle lui retirait la qualification de revendeur agréé, en raison de la violation de l’interdiction de la vente à distance, quelques semaines seulement après qu’Apple a imposé cette modification au contrat liant la marque à ses revendeurs.

Olympic avait bien tenté de protester contre cette orientation, sans succès. Par la voix de son président Francis Ravel, Olympic regrettait de ne pas pouvoir faire bénéficier ses clients d’importantes réductions sur les produits Apple : 990 dollars pour un Apple II Plus (contre 1 530 chez Apple), ou 2 788 dollars pour un Apple III 256K (contre 4 295 chez Apple).

Mais pour Markkula, Apple ne doit pas s’arrêter là : elle doit s’atteler à rendre l’informatique plus simple, tellement simple qu’il n’y aura même plus besoin d’explications. C’est le but des projets dont Markkula ne dit pas grand-chose, à part qu’ils doivent permettre de réduire le temps d’apprentissage de vingt heures à vingt minutes. On se souvient qu’en 1982, Apple travaillait sur ses projets Lisa et Macintosh, dotés d’une souris et d’une interface graphique.

Markkula rassure immédiatement ses lecteurs : l’Apple II ne deviendra pas pour autant obsolète ! Comme « une bonne vieille Volkswagen », il restera pleinement fonctionnel et fiable, pour faire le job pour lequel il a été acheté. Apple continuera d’assister les utilisateurs, et même d’en produire surement trois ou quatre ans encore. En réalité, l’Apple IIgs poursuivra même sa carrière jusqu’en 1992.

Markkula aborde ensuite le sujet de l’Apple III. D’après lui, les développeurs se montrent très intéressés par cette machine commercialisée depuis un an. Cinquante à soixante d’entre eux développeraient des logiciels dédiés à ce système, qualifié de « rêve pour les développeurs ». Sauf que l’Apple III sera un criant échec commercial, notamment faute de logiciels dédiés.

L’interview enchaine sur le sujet de la copie de logiciels. On sait que le sujet était sensible à l’époque, avec une guerre entre les outils de protection installés sur les disquettes et les systèmes de copie tentant de les contourner, comme le WildCard. Markkula dit comprendre l’interrogation des utilisateurs auxquels on demande 600 dollars pour « une simple disquette ». Il recommande une politique tarifaire très agressive, pour justifier l’achat par le consommateur, qui doit aussi bénéficier de services, comme un support téléphonique ou la possibilité de remplacer une disquette défectueuse contre une neuve. On retrouve là le choix d’Apple de proposer son système en mise à jour gratuite depuis quelques années, plutôt que de tenter de le protéger agressivement au détriment des utilisateurs de bonne foi.

En conclusion, après avoir décrit sa propre utilisation de l’ordinateur, il rappelle le souhait d’Apple d’accompagner ses clients au quotidien. En proposant un ordinateur qui en donne plus à ses utilisateurs qu’eux-mêmes ne l’espéraient, Apple s’engage à offrir le meilleur service, en visant la plus grande satisfaction de ses clients.

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