Après Alstom, au tour de l’inconnue télécoms pour Bouygues

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par Gilles Guillaume et Gwénaëlle Barzic

PARIS (Reuters) – L’accord conclu dimanche entre Bouygues et l’Etat français va permettre au groupe de BTP de régler à terme l’inconnue Alstom et de se concentrer sur son autre défi, l’avenir de sa division télécoms.

Une cession de tout ou partie de la participation de Bouygues dans le spécialiste des infrastructures de transport et d’énergie fait l’objet de spéculations depuis que le pari initial de construire un géant français du nucléaire a fait long feu. Cette hypothèse a été renforcée en début d’année quand Bouygues a dû déprécier sa participation dans Alstom après la révision à la baisse des prévisions de ce dernier.

“Il est positif de voir que Bouygues va pouvoir réduire son exposition à Alstom”, écrit UBS dans une note. “Nous notons toutefois que le cash ne pourrait rentrer qu’à une échéance relativement lointaine.”

A compter de la finalisation du rapprochement Alstom/General Electric, attendue au premier semestre 2015, l’Etat français disposera pendant vingt mois d’une option d’achat sur 20% du capital d’Alstom, soit sur le marché, soit auprès de Bouygues si le cours de Bourse d’Alstom est supérieur ou égal à 35 euros.

“Sur le timing de l’entrée du cash, ce n’est pas un sujet parce que Bouygues n’a pas de problème immédiat de liquidité”, précise une source proche du groupe. “Ce qui compte pour les agences de notation sera de diminuer la dette et de savoir qu’il y aura du cash à entrer plus tard.”

Les analystes d’UBS estiment que la vente des titres Alstom pourrait rapporter à Bouygues jusqu’à deux milliards d’euros et réduire son ratio dette nette/Ebitda à moins de 0,5 fois, contre 1,3 fois à l’heure actuelle.

L’action Alstom a clôturé lundi en baisse de 4,11% à 26,85 euros, tandis que le titre Bouygues a reculé de 2% à 31,635 euros.

D’AUTRES DIVERSIFICATIONS ?

Malgré les interrogations qui demeurent sur le montant exact que Bouygues pourra retirer de la vente de ses parts, le déblocage de l’alliance entre Alstom et GE préfigure le versement dans un premier temps d’un dividende exceptionnel lié à l’opération, à la fin du premier trimestre 2015 ou au début du deuxième.

Et la perspective de rentrées de cash futures améliore les marges de manoeuvre financières du groupe, ainsi placé dans une position plus confortable dans l’éventualité d’une relance des discussions sur la vente de sa division télécoms.

Dégagé de son rôle d’actionnaire de référence d’Alstom, Bouygues pourra arbitrer et céder le solde plus tard, indique une source proche du dossier.

A moins qu’il ne souhaite conserver une participation en faisant le pari d’un rebond futur d’Alstom en Bourse. “A quel niveau de participation sera le groupe à la fin des 20 mois, personne n’en sait rien”, indique cette source. “On ne peut pas dire que ce soit la fin de l’aventure Alstom.”

GAGNER DU TEMPS DANS LES TÉLÉCOMS

La division télécoms, esseulée après l’échec de sa tentative de rachat de SFR et faute d’avoir abouti pour l’instant dans ses discussions en vue d’un rachat par Free (Iliad) et Orange, a été contrainte d’annoncer au début du mois des coupes dans ses effectifs.

Pour rebondir, Bouygues Telecom, en perte au premier trimestre, veut enfoncer le clou de sa stratégie offensive dans le fixe destinée à attaquer Free sur sa vache à lait grâce à laquelle, fort de marges de plus de 40%, il finance sa percée dans le mobile.

Après avoir lancé en mars un forfait télévision, internet et téléphone à moins de 20 euros, l’opérateur devrait dévoiler jeudi une nouvelle offre à prix cassés dans la fibre optique au risque d’entamer ses propres marges, ce qu’une source au fait du dossier présente comme une “stratégie de destruction mutuelle assurée”.

“Si l’impasse sur une consolidation persiste, tout le monde va se retrouver dans un navire en train de couler”, estime cette source. “L’argent d’Alstom voudra juste dire que (le PDG) Martin Bouygues disposera de davantage de gilets de sauvetage et pourra se maintenir à flot et protéger ses salariés un peu plus longtemps.”

Il est prématuré de dire si après Alstom et les télécoms, Martin Bouygues tentera une nouvelle diversification ou se concentrera sur son coeur de métier.

“Avec le cash d’Alstom, Bouygues pourra réduire sa dette. S’il vend aussi Bouygues Telecom, le groupe pourra totalement se désendetter et garder un oeil sur des acquisitions potentielles”, commentait Exane dans une note publiée avant l’accord de dimanche. “Le management ne voit pas d’urgence à se diversifier hors du secteur du BTP.”

(Edité par Dominique Rodriguez)

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